Texte publié sur le site du magazine Paulette ici.
Y'avait
Noël avec un beau sapin et une mer de cadeaux brillants dessous,
empaquetés avec soin, rutilants, des gros, des p'tits, des moyens,
des longs, des carrés, des ronds et même des plats, tout j'te dis.
Y'avait
nous, avec nos beaux habits du dimanche, nos airs heureux, un sourire
vissé soul'bas du visage, sourire qui reste toute la soirée même
quand on mange les marrons trop cuits pis la dinde un peu sèche,
mais faut pas l'dire, faut dire que tout est très bon, avec un grand
sourire vissé.
Y'a
la table géante au milieu d'la pièce trop petite pour nous tous, et
on rentre les ventres et on sert les fesses et on rabat les chaises
pour aller aux water, j'aime autant te dire qu'on peut pas faire ça
discretos ces soirs-là.
Y'avait
les messes basses de famille qu'on dit pas, auxquelles on veut pas
penser pour Noël, on y pense quand même mais le sourire ça marche
hyper bien comme méthode coué. Alors on en parle pas, on les garde
pour après, dans la voiture, quand on débrif la soirée. Tranquille
entre nous, on desserre les ventres et les sourires se décomposent
par morceaux en même temps qu'on voit passer les lumières
accrochées un peu partout, et déjà ya des gens qui balancent leur
sapin dans la rue, leur sapin déshabillé de ses belles guirlandes.
Ça m'a toujours rendu vachement mélancolique les sapins d'après
Noël et c'est pour ça que j'en veux pas, jamais, ce en quoi on est
assez d'accord lui et moi, et ça ça m'fait plaisir.
Globalement
on est assez d'accord sur tout t'façons, sauf sur le coup des
plantes dans la maison, lui il aime pas, ou disons une ça passe,
mais pas plein, ou sur l'affaire des lapins que j'ai déjà évoqué
ici,
je vais pas recommencer, mais juste pour faire les comptes: les
plantes je gagne, les lapins je perds.
Mais
je dois dire que ces jours-ci, malgré Noël, malgré avoir revu des
vieux amis que j'aime d'amour, malgré toutes les bonnes nouvelles
qui s'annoncent pour une nouvelle année au top, j'avais pas l'humeur
en phase.
On
a des fois des jours sombres sans savoir pourquoi, des jours où on
veut rester au lit, sous la couette, avec rien d'autres que son
oreiller fétiche et des bédées pis des livres et de la musique
mélancolique, tu vois bien quel genre de jours j'veux dire.
Les
jours où même si le soleil brille dehors, tu veux traîner en pyj
avec des chaussettes dépareillées et pas d'coiffure, les jours où
t'avales le ptit dèj du bout de la lip sans aimer le café ni
trouver suprême l'odeur du pain grillé. Ce genre de jour où tu
regardes les gens que t'aime avec un oeil vide et tu te dis Pfff, tu
te dis Mouais, tu te dis Bof. Alors que tu sais que tu les aimes.
Pour de vrai.
Ça
faisait plusieurs jours que j'étais d'une humeur bougon, et que
j'faisais faire les montagnes russes des sentiments à mon a., çuilà
qu'a sa majuscule dorée en début de nom, çuilà qu'a les réserves
d'amour pour toute la vie jusqu'à des siècles futurs où les ipad
feront micro-ondes, çuilà qui sait m'flanquer des sourires dans les
veines même quand j'ai une tête des six pieds de longs et un regard
nuageux, tout ça.
J'sais
pas si y voyait trop mes humeurs maussades tellement il a le bonheur
vissé au corps çuilà, mais je te jure que je voulais parfois me
battre de pas lui montrer plus les grands sentiments que je
ressentais, même avec mon mauvais karma de ces jours-ci.
Et puis tu sais, j'avais franchement aucune raison d'être triste.
Et puis tu sais, j'avais franchement aucune raison d'être triste.
Pour
me changer les idées, je repensais à des choses belles, mais ça
changeait pas grand chose en vrai, je sais pas pourquoi. J'avais
besoin sans doute d'un grand coup d'frais, d'un grand coup d'neuf,
sauf que je l'avais déjà eu mon grand bol d'air et que j'en voulais
encore. Alors quoi ?
Chais
pas.
Y
a des fois t'expliques pas, tu subis une humeur qu'a zéro raison
d'être, qu'a zéro racine à arracher dans ton coeur, qu'est venue
là comme un nuage devant l'soleil des jours tranquilles, et tu peux
seulement attendre l'éclaircie en te disant Bordel j'ai pourtant
tous les meilleurs trésors du monde alors quoi ?
Bah
rien.
La
météo des sentiments ça s'commande pas on t'l'a déjà dit.